Au temps des rois - notre village avant 1789

Au Temps des Rois - Notre village avant 1789

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Dans le pays de Sologne qui est très peuplé et qui comprend les deux tiers de l'élection (d'Orléans et de Beaugency),
la récolte ne suffit pas ordinairement pour faire vivre les habitants pendant la moitié de l'année" M. de Bouville - 1728
Collection Muguette RIGAUD

La période qui s'écoule de la fin du règne de Louis XIV à la Révolution est, pour la Sologne, la période la plus noire de son histoire agricole, donc de son histoire humaine.Le Maire de Vouzon, en 1790, parle "du pays le plus malheureux de France" et, pour le Directeur Général de l'Agriculture "la Sologne était le néant, elle était la stérilité et le désert".

Partout ce ne sont que "steppes arides, couvertes d'un sable ou plutôt d'une poudre friable et grise, et semblable à de la cendre ... des plaines moitié eau, moitié terre, où le jonc se querelle avec la bruyère, où le quadrupède perd pied, où le poisson meurt..." ; çà et la, on rencontre des flaques d'eau qui donnent naissance à des émanations pestilentielles et que les habitants décorent du nom pompeux d'étangs...".

Au milieu de cette désolation, 812 habitants de la paroisse de Pierrefitte essaient de survivre. Leur paysage ne diffère en rien du reste de la Sologne : à Pierrefitte "les terres qui servent à la production sont sablonneuses, peu d'argile, un tuf rouge et blanc mêlé de petits cailloux y succède à peine à un pied de surface. On n'y peut récolter que le seigle, blé noir ou sarrasin; à peine si ces récoltes se trouvent suffisantes pour la consommation qui s'y fait. On y connait peu d'étangs et en petites grandeurs.  Les prairies sont en petites quantités. Les bruyères occupent les trois quarts du terrain."

La seule ressource des cultivateurs est la vente des moutons (bêtes à laine) quand la maladie ne vient pas décimer l'ensemble du troupeau.

La population dont la seule ressource vient de la terre ou des travaux liés à la culture, est surtout répartie dans les haleaux des Noirs, Malveau, Boulère, les Jarriers, les Folets, les Vèves et les Alicourts. Chose curieuse, et nous l'avons déjà évoqué, Pierrefitte  : à cette époque partage un tiers de son territoire avec Brinon, Nouan et Salbris.  (Les Alicourts, l'Epinière, le Bouchot, Maubertin, la Bougrie... une année sur deux font partie de Pierrefitte, l'autre de Brinon....).

Peu de différence avec notre époque : pratiquement les mêmes lieux dits, les mêmes fermes; quelques disparitions cependant : la Huberderie, l'Aubry, Daubet, Lévy, la Briqueterie de Lévy. Les moulins sont en nombre. Sur le Beuvron, c'étaient le Moulin de la Brosse, le Moulin du Coudray, sur la Sauldre, le Moulin de Villemignon, Moulin-Bourdon, Moulin de l'Ardoise, sur la Boute, Moulin-Sarrazin, Moulin des Fossés .... (voir carte de Cassini).

Ne croyez surtout pas que le métier de meunier ou de farinier soit sans danger : en 1756, Michel MITENNE, 35 ans, meunier de la Brosse, périt par accident, ayant été écrasé par la roue du moulin où il s'était laissé surprendre.

Le point central de la paroisse, même s'il n'est pas le lieu le plus peuplé, est tout de même le village. Lieu protégé par des mesures fiscales puisqu'hommes, bêtes, qui y pénètrent y paient un droit d'entrée.  Mais pour venir jusqu'à sa porte il faut d'abord, si l'on arrive de Souesmes ou Aubigny, franchir la Sauldre.  Il y a le gué, bien sûr, mais on ne peut le passer avec les voitures que 4 mois par an. Vers 1755, le Gouvernement fit construire un pont de bois.  Depuis son établissement, il est resté sans entretien si bien qu'à la veille de la Révolution, en 1789, les voyageurs sont incapables d'y passer sans faire courir aux chevaux et aux voitures un danger évident (plusieurs étais étant rompus, une partie du plancher pourrie).

Des routes mal entretenues, faites d'une terre de mauvaise qualité, menaient au bourg.  Longtemps, Pierrefitte avait été un lieu de passage très important. Mais, depuis 1760-1770, l'ancienne route d'Orléans à Bourges par Vouzon, Pierrefitte, Souesmes, Allogny, était de moins en moins fréquentée.

Sur une longueur de 1200 mètres, notre village était entouré de fossés de terre que la légende populaire attribue à la période gauloise mais dont l'origine http://www.pierrefitte-sur-sauldre.fr/img/rois3.gifsemble n'être que de la fin Moyen-Age (1400-1500). En certains endroits, ils ont encore 4 à 6 mètres de large et une profondeur également variée de 1,50 mètre à 3 mètres. Une eau souvent croupie, à l'odeur pestilentielle, n'engage pas le voyageur à séjourner. Ces fossés occupent une place importante dans la vie de nos lointains aïeux.

Parfois, ils sont "refuge"; en 1668, un passant y trouve une fillette de 8 jours abandonnée; quelquefois, ils sont "sépulture" en 1758, Jeanne Pérot y périt "noiée par accident".

Chacun essaie d'en curer et d'en entretenir un petit coin propre pour y faire un lavoir. Ils seront aussi source de

nombreuses disputes ; les uns y plantaient des arbres, les autres y installaient leur jardin... et tous ceux qui n'avaient pu y trouver place (et ils étaient nombreux) animaient la polémique et portaient plainte.

 

Maisons
Peu de monde à l'intérieur de ces remparts : beaucoup de jardins et seulement une centaine de familles. Les maisons en garnissent à peine les rues qui sont larges et assez bien alignées (la rue de Maupillon par exemple).

Ces maisons étaient de construction rudimentaire. Elles étaient formées de bois et de terre argileuse mêlée avec de la bruyère hachée et de la paille.

Ecoutons un vieux Solognot de Souesmes parler, au siècle dernier, des maisons de son enfance :

Elles a taint couvertes en chaume.  U!h soumurage, des soles des montants en boues (bois) anvec du torchis entère, eune porte et eune croisée carrée d'un li-mètre d'coûté anvec quat'e p'tits carreaux.  A taint basses d'plafond et la poutre vous touchait tant si peu qu'n'on t'ait grand, les solives a taint brutes souvent tortues.  L'carr'lage était souvent absent et n'on marchait sur la terre durcie. J'en ai vu la voù qu'n'on descendait une ou deux marches après l'siou (le seuil). Elles étaient parfois enfoncées d'un mètre dans le sol".

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L'entretien en est de plus en plus difficile car, à Pierrefitte, en 1789, "le bois de toutes espèces commence a y venir rare, particulièrement les bois de hautes futaies si nécessaires pour l'entretien des habitations".

Sous l'Ancien Régime, la Religion, mêlée à beaucoup de superstition guidait chaque acte des villageois d'où la place importante de l'église dans la vie locale.

Elle ressemblait alors à celle de Brinon ou de Souvigny. Des galeries larges de 3 mètres l'entouraient, longues de 25 mètres à l'ouest; elles dissimulaient le portail d'entrée, puis se prolongeaient de 12 mètres à l'est, pour venir s'appuyer sur la chapelle de la Sainte-Vierge bâtie au XV ou XVlème siècle (la chapelle du Sacré-Coeur, qui lui fait face, ne sera élevé qu'en 1875, grâce aux dons des Demoiselles DEZELLUS).

Ce "caquetoir", commun à plusieurs églises solognotes, sera pendant très longtemps "le salon où l'n cause"... A l'issue de la messe dominicale, on y lisait les di­rectives communales ou royales, on y traitait des af­faires , on y visitait les marchands ambulants. Ce fut certainement là, une halle marchande très animée.(Ces galeries ne furent abattues qu'en 1875 après de vio­lentes polémiques).

La voûte de l'église n'était qu'un très mauvais lambris en planches plus ou moins égales, qui n'empêchaient ni le froid, ni la neige de pénétrer. Aussi l'église,qui était très froide en hiver, devenait une fournaise en été.  La nef, avec ses murs sales, tordus, son lambris pourri, ressemblait plutôt à une grange qu'à une église. Quant aux fenêtres, il n'y en avait pas deux de la même forme et de la même grandeur.

 

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Eglise avec ses galeries et sans chapelle latérale....
Il manque le cimetière (photo reconstituée)

Ni terre, ni chaux ne liait les pierres de fondations et si les murs supportaient la toiture, c'était uniquement grâce à leur épaisseur. Les sonneurs attitrés, Martin et Louis ARNOULT, Toussaint DUBOIS, y faisaient résonner à toute volée les trois cloches nommées PIC DAN JON. Il n'y aura plus qu'une cloche après la Révolution, les deux autres ayant été fondues pour faire canons et munitions.

Tout autour de l'église, le cimetière. Il occupait à peu près la même surface que la place engazonnée actuelle. Un mur de briques l'entourait (ces briques seront d'ailleurs reprises pour clôturer l'actuel cimetière). La dernière inhumation y eut lieu le 3 Juillet 1838.  (A chaque travail place de l'Eglise adduction d'eau par exemple, les ouvriers mettent à jour tibias, crânes, et autres parties du squelette de nos "grand-Pères").

L'Auditoire (l'ancienne Chambre Communale ou "Mairie"), mais aussi la prison étaient voisins de l'Auberge des Trois-Rois. Cette prison (à la place de la boulangerie actuelle) fut démolie en 1811.

 

 

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Malgré l'abandon progressif de la route Orléans - Bourges, de nombreux voyageurs séjournaient dans notre village. Cinq auberges pouvaient leur assurer le gite et le couvert : la Croix-Blanche, le Sermon, les Trois-Rois, le Sauvage et le Lion d'Or qui était l'établissement fréquenté par "Les Gens de qualité" et les "Honorables personnes".  Le propriétaire en était Sylvain MICHOU, Syndic (Maire) de la Commune.

En 1759, "l'honnête personne", Monsieur Charles LAIR TULLIER,dit ordinairement LE PELLIER, Bailly d'Ivoy et Directeur des Forges, y rend l'âme, ne pouvant aller plus loin dans son voyage.

Dans ce triste cadre de vie, vont naître, vivre et mourir une communauté de Solognots harassés de travail, de faim et de peine

 

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